L’aviculture des psittacidés : de l’Antiquité à la Belgique moderne

Quand l’homme rencontre le perroquet

Depuis des millénaires, les psittacidés accompagnent l’histoire humaine : guides spirituels, compagnons de prestige ou encore symboles de beauté et d’intelligence. Si autrefois leurs plumes ornaient les rituels amazoniens ou les parures royales, aujourd’hui, c’est dans les volières belges que leur héritage se poursuit, à travers une passion devenue science.

L’aviculture des perroquets et perruches en Belgique a connu une évolution remarquable. Longtemps considérée comme un simple loisir, elle s’est progressivement structurée grâce à l’expérience des éleveurs, aux échanges internationaux et à la prise de conscience des enjeux liés à la conservation. Désormais, les passionnés ne se contentent plus d’élever ces oiseaux pour leur beauté ou leurs chants : ils s’engagent à préserver la diversité génétique, à améliorer les conditions de vie en captivité et à participer, parfois, à des programmes de sauvegarde d’espèces menacées.

L’avenir de cette pratique repose sur un équilibre délicat entre tradition et innovation. Les générations futures d’éleveurs devront composer avec de nouveaux défis : respect accru du bien-être animal, réglementation européenne plus stricte, sensibilisation du grand public et contribution active à la protection de la biodiversité. Mais ces défis représentent aussi une formidable opportunité : celle de donner à l’aviculture belge un rôle reconnu et durable dans la préservation des psittacidés.

Ainsi, de l’Amazonie ancestrale aux volières belges, le lien entre l’homme et le perroquet ne cesse de se réinventer. Plus qu’un loisir ou une passion, l’élevage des psittacidés en Belgique s’inscrit dans une histoire universelle où curiosité, respect et transmission s’entremêlent. L’avenir dépendra de notre capacité à faire de cette tradition un moteur de conservation et d’éducation, afin que les couleurs et les voix des perroquets continuent d’émerveiller les générations à venir.

Du luxe royal aux salons européens

Avec les grandes explorations, les perroquets quittent les forêts tropicales pour gagner les cours royales. Alexandre le Grand rapporta des perruches d’Inde (Perruche Grande Alexandre), l’empereur Néron avait un perroquet africain, et Marie-Antoinette se plaisait à montrer le sien à ses invités.
Plus tard, la reine Victoria fit des perruches ses compagnes préférées. Même Winston Churchill avait son perroquet gris, Charlie, célèbre pour ses colères verbales et sa longévité exceptionnelle.

Winston Churchill premier ministre d’Angleterre 1940-1955

L’arrivée de la passion populaire

Longtemps réservés aux rois et aristocrates, les perroquets vont peu à peu conquérir les foyers. Le grand tournant eut lieu en 1840 avec l’arrivée en Europe de la perruche ondulée. Facile à élever, joyeuse et colorée, elle devint en quelques décennies l’un des oiseaux les plus répandus au monde.
À sa suite, les inséparables, les calopsittes et bien d’autres espèces prirent place dans les volières des amateurs. Les premiers clubs ornithologiques virent alors le jour en Europe, donnant naissance aux concours, aux expositions et aux standards de couleur.

Marché aux oiseaux sur la grande place de Bruxelles

La Belgique, une terre d’éleveurs passionnés

La Belgique n’est pas restée en marge de ce mouvement. Dès les années 1930, des clubs locaux apparaissent à Bruxelles, en Flandre et en Wallonie. Après la Seconde Guerre mondiale, l’aviculture explose : expositions, concours et échanges d’oiseaux deviennent des rendez-vous populaires.
Dans les années 1970, l’interdiction d’importer des perroquets sauvages bouleverse la pratique. Mais loin de décourager les passionnés, cela stimule la reproduction en captivité. Les éleveurs belges se font alors remarquer pour leur savoir-faire et leur capacité à stabiliser certaines espèces rares.

Marché aux oiseaux Moderne

ABAP et BVP : deux associations de référence

En Belgique, deux associations spécialisées jouent un rôle central :

  • L’ABAP (Association Belge des Amateurs de Psittacidés) réunit les passionnés de perroquets, en Wallonie et à Bruxelles. Elle organise des rencontres et publie des informations techniques précieuses.
  • Le BVP (Belgische Vereniging voor Parkieten), très actif en Flandre, rassemble les éleveurs de perruches et contribue à définir des standards de qualité dans les concours européens.

Ces deux associations, en collaboration avec les grandes fédérations comme la KBOF, ont permis de créer un réseau structuré et dynamique, où chaque éleveur, du débutant au plus chevronné, trouve sa place.

Quand passion et conservation se rencontrent

Depuis plusieurs décennies, la Belgique occupe une place particulière dans le monde de l’aviculture et de la conservation des perroquets. Les éleveurs belges ne se sont pas limités à reproduire des oiseaux communs : ils ont, grâce à leur patience et leur savoir-faire, réussi à obtenir des mutations de couleurs spectaculaires dans différentes familles de perruches et de petits perroquets, ce qui a contribué à leur renommée internationale. Leur passion ne s’arrête pas à l’aspect esthétique : certains se sont aussi spécialisés dans la reproduction de familles plus exigeantes, comme les grandes perruches ou les aras, contribuant à mieux comprendre leurs besoins et à perfectionner les techniques d’élevage en captivité.

Parallèlement, les parcs zoologiques belges ont joué et continuent de jouer un rôle essentiel dans la conservation. Le Zoo d’Anvers, pionnier en la matière, fut l’un des premiers à s’impliquer dans des programmes européens de reproduction coordonnés. Ces initiatives visent à maintenir des populations viables et génétiquement diversifiées au sein de grandes familles de perroquets, qu’il s’agisse des aras, des cacatoès ou des amazones.

Aujourd’hui, des institutions comme Pairi Daiza renforcent cette dynamique en collaborant avec des associations internationales spécialisées, telles que l’ACTP (Association for the Conservation of Threatened Parrots). Ces coopérations associent reproductionencaptivité, sensibilisation du public et parfois même réintroduction dans la nature. Grâce à cette double dynamique, la Belgique se distingue non seulement comme un pays de passionnés, mais aussi comme un acteur engagé dans la préservation à long terme des différentes familles de perroquets à travers le monde.

Jeunes ara de Spi’x élevé en captivité

L’aviculture des psittacidés en Belgique a parcouru un chemin remarquable, passant d’une pratique essentiellement passionnelle et artisanale à une activité de plus en plus structurée, consciente des enjeux éthiques et environnementaux. Aujourd’hui, l’avenir de cette filière repose sur un équilibre délicat : préserver la passion et le savoir-faire des éleveurs tout en répondant aux nouvelles exigences en matière de bien-être animal, de conservation des espèces et de durabilité.

Avec une meilleure sensibilisation du public, le renforcement des échanges entre éleveurs et scientifiques, ainsi que l’adoption de pratiques responsables, l’aviculture des psittacidés en Belgique semble promise à un avenir où passion, respect et innovation pourront coexister. Plus qu’un simple loisir, elle pourrait ainsi devenir un véritable vecteur de préservation et de valorisation de la biodiversité.

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